Rapport final du projet "Agriculture suisse sans pesticides" 2017 - 2021
Le projet "Agriculture suisse sans pesticides", dont l'objectif est de renoncer totalement aux pesticides en Suisse, est né du projet "Agriculture sans pesticides" publié par Vision Landwirtschaft en mai 2016.Plan de réduction des pesticides en Suisse". A l'époque, Vision Landwirtschaft était encore largement seul à poursuivre cet objectif. Même de nombreuses organisations partenaires considéraient l'abandon des pesticides comme une utopie plutôt que comme une vision réalisable. L'opinion selon laquelle les pesticides sont nécessaires en tant que compromis finalement indispensable d'une production alimentaire moderne était profondément ancrée jusque dans les milieux environnementaux. Ils se sont donc contentés de concentrer leurs efforts sur l'optimisation et la réduction de l'utilisation des pesticides.

Un bref regard en arrière permet de mettre en évidence le changement fondamental auquel nous avons contribué : Fin 2016, Vision Landwirtschaft a lancé l'idée d'un projet "Agriculture suisse sans pesticides" avec pour objectif de renoncer totalement aux pesticides en Suisse. L'élaboration de la description du projet "Agriculture suisse sans pesticides" s'est faite dans la continuité du plan de réduction des pesticides et a repris des idées de mise en œuvre déjà existantes qui n'auraient pas pu être intégrées dans le plan de réduction. Le plan d'action PSM insatisfaisant de la Confédération, publié quelques semaines seulement après la publication du plan de réduction des pesticides, a été une autre impulsion pour le projet. Grâce à des analyses fondées, le projet devait montrer que - contrairement à l'hypothèse du plan d'action - une production alimentaire largement exempte de pesticides était possible en Suisse en quelques années.
Aujourd'hui, après l'achèvement du projet "Agriculture suisse sans pesticides", de larges cercles reconnaissent la nécessité d'abandonner l'utilisation de pesticides pratiquée jusqu'ici pour la production de denrées alimentaires. Un pas important vers l'acceptation générale de l'abandon a été l'accord de la Alliance agricole fin 2019 à un événement organisé par Vision Landwirtschaft et WWF rédigé Prise de position. Ce document se base sur le plan de réduction des pesticides de Vision Landwirtschaft et fixe l'abandon comme objectif. Pour l'Alliance Agraire, qui, en raison de sa composition très diversifiée et jusque dans les milieux agricoles, recule généralement devant les revendications fondamentales de politique agricole, il s'agissait là d'une véritable révolution et d'un signe important vers l'intérieur et l'extérieur.
Les vastes recherches et collectes de données publiées dans le cadre du projet ont largement contribué à ce revirement. Elles ont montré que même la Suisse - un pays dont le système juridique fonctionne en principe, dont l'application est conforme à l'État de droit et dont les lois sur la protection de l'environnement sont strictes - est loin d'avoir ne serait-ce qu'un début de contrôle de l'utilisation des pesticides. Les graves conclusions ont même surpris de nombreux spécialistes et représentants du secteur. Parallèlement, le projet a régulièrement dressé le portrait de producteurs qui renoncent avec succès aux pesticides ou a mis ces personnes à disposition pour des articles de fond dans les médias quotidiens. En montrant à plusieurs reprises que "oui, on peut aussi se passer de pesticides", les organisations concernées ont gagné en confiance dans cette voie qu'elles jugeaient auparavant trop extrême.
Enfin, le changement d'attitude a été en grande partie dû au lancement des deux initiatives agricoles, en particulier l'initiative sur l'eau potable (IEP). Dès le début, l'équipe du projet "Agriculture suisse sans pesticides" a apporté un soutien technique, conceptuel et médiatique intensif au comité d'initiative de l'initiative TWI. Les PPS, tout comme l'initiative sur les pesticides, ont largement contribué à faire de l'utilisation de pesticides à grande échelle dans l'agriculture et des dommages massifs qui en découlent un thème médiatique permanent. Parallèlement, les deux initiatives agricoles ont fortement contribué à déclencher un changement de mentalité dans de nombreuses exploitations agricoles. Grâce à d'innombrables mesures pratiques, qui ont été régulièrement mises en évidence et communiquées dans le cadre du présent projet, de nombreuses exploitations ont tenté depuis de renoncer à l'utilisation de pesticides ou de la réduire. Ce processus, par ailleurs peu communiqué et porteur d'espoir, contrastait singulièrement avec la communication des grandes associations agricoles et de l'agro-industrie qui travaille en étroite collaboration avec elles et qui, jusqu'à aujourd'hui, tente de présenter l'utilisation de pesticides comme inéluctable. Le lobby agricole argumente que l'abandon des pesticides entraînerait de gros problèmes d'approvisionnement de la population en denrées alimentaires indigènes ou qu'il faudrait importer davantage de denrées alimentaires produites de manière non durable.
Un succès important en vue d'un changement fondamental a également été le wording, c'est-à-dire l'utilisation du langage dans le public. L'agro-industrie, la Confédération, la plupart des représentants de la branche et même certaines organisations partenaires de l'Alliance agraire utilisent et défendent systématiquement le terme "produits phytosanitaires (PPP)". Personne ne doit associer ces produits à des dommages environnementaux ou à des problèmes de santé. Le terme "pesticides" a été strictement rejeté par ces milieux. Grâce à l'utilisation et à la justification obstinées du terme "pesticide", que l'initiative sur les pesticides et l'initiative sur l'eau potable ont toutes deux adoptées en se basant sur la définition du plan de réduction des pesticides, ce terme important est aujourd'hui bien établi.