(VL) Pour la Suisse, les modèles climatiques prévoient une augmentation des événements extrêmes au cours des prochaines décennies. Les scénarios d'évolution du climat en Suisse (MétéoSuisse, 2018) décrivent les changements climatiques attendus, auxquels les agriculteurs doivent se préparer. L'agriculture sera surtout touchée par la sécheresse, les fortes précipitations, la chaleur estivale et les gelées printanières. En outre, les températures plus douces modifient le risque de maladies végétales et d'attaques parasitaires. Aujourd'hui déjà, le réchauffement climatique a des répercussions sur les récoltes et la production alimentaire dans différentes régions de Suisse - les conséquences négatives sont plus fréquentes que les conséquences positives. Si le changement climatique n'est pas freiné, la production agricole en Suisse sera de plus en plus affectée, surtout si l'eau disponible devient rare pendant la période de végétation. Dans les régions qui ont déjà souffert de la sécheresse, celle-ci devrait encore s'accentuer. Les variations météorologiques exceptionnelles vont placer les agriculteurs suisses devant des défis particuliers et menacer la sécurité des rendements.

Mais l'agriculture contribue également au changement climatique. Les facteurs clés sont les émissions de gaz ayant un impact sur le climat, à savoir le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4) et le protoxyde d'azote (N2O). Le méthane se forme principalement dans l'appareil digestif des animaux d'élevage, le protoxyde d'azote principalement lors de l'exploitation des sols par la dégradation bactérienne des composés azotés.

L'inventaire suisse des gaz à effet de serre recense les émissions provenant de la digestion des animaux de rente, de la gestion des engrais de ferme et des engrais minéraux, ainsi que des sols et de l'incinération des déchets verts agricoles (OFEV, 2022). En 2021, selon l'inventaire suisse des gaz à effet de serre, 14,3% des émissions totales de gaz à effet de serre de la Suisse étaient imputables à l'agriculture. L'inventaire suisse des gaz à effet de serre ne tient pas compte des émissions grises générées par la production de biens importés. Il s'agit principalement d'aliments pour animaux. Mais la culture et le transport sont également à l'origine d'émissions nocives pour le climat. L'utilisation d'engrais minéraux azotés engloutit également 24 millions de litres de pétrole par an et produit 80 000 tonnes de dioxyde de carbone (CO2). Les véhicules agricoles en Suisse consomment environ 150 millions de litres de diesel par an (Agroscope, 2015). Globalement, l'agriculture suisse utilise environ 2,5 fois plus d'énergie pour la production que celle contenue dans les produits agricoles récoltés (OFAG, 2017). A titre de comparaison : L'agriculture indienne n'a besoin que de 0,7 kilocalories pour produire une kilocalorie de nourriture. L'objectif devrait être que l'agriculture n'investisse pas plus d'énergie dans la production que celle contenue dans les produits récoltés. Les concepts et les solutions visant à améliorer l'efficacité énergétique font encore largement défaut, et la politique agricole continue d'encourager l'utilisation inefficace de l'énergie, par exemple par le biais du remboursement de l'impôt sur les huiles minérales sur le carburant diesel consommé dans l'agriculture. La consommation de diesel dans la sylviculture et l'agriculture ne contribue qu'à 10 % des émissions de gaz à effet de serre de l'agriculture suisse (Vision de l'agriculture, 2023). La principale source est l'élevage, avec 71 %, le reste provenant des sols agricoles. Mais la production d'aliments pour animaux présente également une efficacité énergétique très défavorable. En Suisse, suite à la spécialisation de l'agriculture dans la production animale, chaque kilocalorie d'énergie alimentaire consomme en moyenne 2,4 kilocalories de sources d'énergie non renouvelables (Office fédéral de l'agriculture (OFAG), 2015). (ZHAW, 2018).

Fiche d'information Changement climatique en Suisse - Vision de l'agriculture Fig. 10 : Les émissions de GES (CO2eq) de l'agriculture suisse de 1990 à 2021 en t CO2eq par an. Les émissions classées de bas en haut : CO2, CH4, N2O convertis en CO2eq, représentation propre avec des données de (OFEV, 2023)

Il est possible de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans l'agriculture en adaptant les modes de production et de consommation. Les possibilités de production comprennent principalement la réduction des émissions provenant de l'élevage et de la gestion des sols. En outre, la quantité de dioxyde de carbone absorbée et fixée par les sols et la biomasse pourrait être augmentée. En complément, les émissions dans l'agriculture peuvent encore être réduites par une optimisation technique. Le potentiel sera toutefois limité et le remplacement total des combustibles et carburants fossiles par des sources d'énergie renouvelables n'est guère réalisable.

L'adaptation aux conséquences du changement climatique pose divers défis lors de sa mise en œuvre concrète. D'une part, le changement climatique et toutes ses conséquences sont un processus complexe, influencé par de nombreux acteurs différents. Les scénarios sont donc difficiles à établir et comportent de nombreuses variables. D'autre part, l'adaptation au changement climatique est un processus à long terme, toujours en cours, dont les effets ne sont généralement pas directement perceptibles.

Il est dans l'intérêt du secteur agricole de prendre des mesures ambitieuses pour réduire les émissions et contribuer à ce que les seuils importants en matière de réchauffement climatique ne soient pas dépassés.

Il est tout aussi important de s'adapter à l'augmentation inévitable des températures et aux événements climatiques qui en découlent. S'il est possible de s'adapter aux effets climatiques en utilisant les techniques déjà disponibles, il existe des limites. Une augmentation de la température moyenne de la Terre de 3 °C ou plus dépassera la capacité d'adaptation de l'agriculture, comme le montrent différents scénarios climatiques.